- VACCINS ET SÉRUMS
- VACCINS ET SÉRUMSL’observation médicale a depuis longtemps établi qu’un grand nombre de maladies infectieuses confèrent aux sujets guéris une protection plus ou moins longue qui est un aspect de l’immunité. La constatation de ce phénomène naturel a suscité la recherche de moyens propres à obtenir une immunité artificielle sans encourir les risques de la maladie et de ses séquelles. Deux méthodes se sont révélées efficaces. L’une sollicite la collaboration de l’organisme au moyen de vaccins qui produisent une immunité active, relativement lente à s’établir, mais dont les effets sont durables. L’autre fournit aux sujets menacés à court terme, ou déjà infectés, les moyens de protection empruntés au sérum sanguin d’organismes immunisés. C’est le principe de la sérothérapie préventive ou curative qui confère une immunité passive, d’efficacité immédiate mais passagère. Les deux méthodes, différentes dans leurs indications, trouvent l’occasion de conjuguer leurs effets dans la prévention de plusieurs maladies infectieuses.1. VaccinsL’histoire a retenu les noms de Jenner qui utilisa, en 1796, le virus d’une maladie animale, la vaccine (cow-pox ), pour protéger l’homme contre la variole, et celui de Pasteur qui fournit, cent ans plus tard, une base scientifique à la préparation de vaccins contre le charbon et contre la rage (1884).Les vaccins confèrent une immunité active, spécifique contre une maladie déterminée, par inoculation de l’agent pathogène atténué ou inactivé de cette maladie ou de sa toxine rendue inoffensive.Vaccins atténués et vaccins inactivésOn applique couramment aux vaccins atténués le qualificatif de «vivant», acceptable quand il s’agit de bactéries mais discutable pour les virus en raison de leur structure. La lutte contre plusieurs maladies à virus (rougeole, rubéole, fièvre jaune) et contre une maladie bactérienne (tuberculose) est réalisée par la préparation de vaccins atténués.Pour certains d’entre eux, l’atténuation est réalisée naturellement: le vaccin antivariolique est fabriqué à partir d’un virus dérivé de l’agent de la variole bovine; ce virus, inoffensif pour l’homme, est antigéniquement voisin de celui de la variole. Il convient de le considérer comme un vaccin «apparenté» ou «adapté». Dans la majorité des autres cas, l’atténuation résulte d’une mutation produite sur la souche virale ou bactérienne, qui devient non pathogène tout en conservant ses qualités antigéniques. Des artifices divers, tels que des passages répétés sur des milieux de culture spéciaux ou sur des hôtes animaux différents, permettent de sélectionner les éléments les moins virulents au sein d’une population bactérienne ou virale. Le résultat est atteint quand la souche est «fixée» à un degré d’atténuation irréversible.Les vaccins atténués présentent des avantages importants: l’agent pathogène reproduit chez le sujet vacciné le processus naturel de l’immunisation et cela au moyen d’une faible quantité d’antigène ; une seule inoculation est généralement suffisante; l’immunité apparaît rapidement, au bout de huit à dix jours, avantage précieux pour les vaccinations de masse en cas d’épidémie. Leurs inconvénients résident dans le risque d’une reprise de virulence, ce qui exige une surveillance prolongée. Ils sont, en outre, fragiles et posent de délicats problèmes de conservation et de manipulation. Enfin, la «prise» de certains d’entre eux, comme le vaccin antipoliomyélitique oral, n’est pas toujours assurée s’ils entrent en concurrence avec d’autres virus présents dans l’organisme.Les vaccins inactivés sont la seule forme utilisable dans le cas où l’atténuation de l’agent pathogène ne peut être efficacement contrôlée et fixée. La plupart des vaccins bactériens, sauf le B.C.G., appartiennent à cette catégorie. L’inactivation doit s’entourer de précautions suffisantes pour ne pas dénaturer les antigènes spécifiques. On utilise soit la chaleur ménagée, soit divers antiseptiques (formol, acétone, bêta-propiolactone), seuls ou associés.Les vaccins inactivés ont l’avantage de la sécurité. Ils ne comportent aucun risque de provoquer la maladie. On a, en outre, la certitude que la dose nécessaire d’antigène est bien introduite dans l’organisme. Leur conservation et leur manipulation ne posent pas de problèmes majeurs. Enfin ils peuvent être combinés entre eux pour réaliser des vaccinations associées d’usage courant. Leurs inconvénients sont liés, pour une part, à la nécessité de répéter les injections pour obtenir une immunité qui est relativement lente à s’établir. La plupart contiennent un grand nombre d’antigènes dont quelques-uns seulement sont essentiels à la production de l’immunité, alors que les autres sont inutiles ou générateurs de réactions secondaires. Le vaccin inactivé idéal ne peut être qu’une substance purifiée ne contenant que la fraction immunisante. Mieux, l’insertion, dans le génome du sujet à protéger, d’ADN codant pour les anticorps protecteurs peut maintenant être envisagée.AnatoxinesGaston Ramon a démontré, en 1923, que la toxine diphtérique, additionnée de formol et maintenue à 40 0C pendant un mois, se transforme en un produit nouveau, l’anatoxine , dépourvu de toxicité, mais ayant conservé son pouvoir immunisant. La même technique a été appliquée aux toxines tétanique et botulique qui font partie, comme la précédente, du groupe des exotoxines. On a pu ainsi obtenir facilement des vaccins produisant une immunité antitoxique solide et durable. La mesure de leur pouvoir antigénique est réalisée par des méthodes simples, celle de l’immunité acquise chez les vaccinés est obtenue par le titrage des anticorps sériques.Qualités des vaccinsUn vaccin doit offrir des garanties d’efficacité et d’innocuité.EfficacitéAvant la préparation du vaccin, le choix des souches de l’agent pathogène permet d’employer les sérotypes reconnus comme ayant une valeur antigénique sûre. A contrario, le meilleur moyen pour étudier l’efficacité du vaccin sera l’enquête épidémiologique qui compare, à l’occasion d’une épidémie, le nombre des malades parmi les vaccinés et les témoins dans un groupe homogène de population.Pratiquement beaucoup de vaccins comportent des substances adjuvantes (sels d’alumine ou de calcium) qui provoquent une inflammation locale favorisant la formation des anticorps. Une efficacité maximale est, d’autre part, induite et entretenue par la pratique nécessaire des injections de rappel qui relancent l’immunité. Sur le plan collectif, la valeur d’une vaccination est liée à la proportion des sujets qui l’ont reçue. Une maladie contagieuse a des chances d’être arrêtée dans son extension quand plus de 70 p. 100 de la population réceptive a été vaccinée.Les organisations internationales qu’inquiètent les ravages des maladies meurtrières que sont la rougeole, la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, la tuberculose et la poliomyélite ont mis au point un programme élargi de vaccination P.E.V. opérationnel en 1977; en 1990, 80 p. 100 des enfants du monde sont immunisés contre ces principales maladies.InnocuitéLa prévention des réactions vaccinales est de la plus grande importance. Celles-ci se manifestent sous plusieurs formes de gravité inégale: réactions locales inflammatoires au point d’injection; réactions générales sous la forme de courbatures fébriles passagères; réactions focales qui se traduisent par une réactivation des crises chez les sujets allergiques. Plus sérieuses sont les réactions d’organe, comme les néphropathies consécutives à la vaccination contre la fièvre typhoïde et les fièvres paratyphoïdes A et B (T.A.B.), les encéphalites observées après la vaccination antivariolique ou anticoquelucheuse. Exceptionnellement survient un choc vaccinal précoce, de type anaphylactique, chez des sujets prédisposés. La fréquence de ces dernières catégories d’accidents ne doit pas être surestimée. Elle ne dépasse pas un cas sur plusieurs centaines de milliers de vaccinés.Le premier élément de sécurité, pour éviter ou limiter les réactions vaccinales, réside dans le soin apporté à la préparation des vaccins: l’atténuation correcte des vaccins vivants qui doivent être fixés à un niveau de virulence irréversible; l’élimination des virus animaux qui pourraient infecter les cultures cellulaires servant à la préparation de ces mêmes vaccins; la suppression des antibiotiques ou des substances chimiques pouvant donner lieu à des phénomènes de sensibilisation; la purification des anatoxines et des vaccins inactivés, afin d’éliminer les antigènes accessoires inutiles ou nocifs. On obtient actuellement des anatoxines diphtérique ou tétanique hautement purifiées, mais le problème des vaccins bactériens ne sera résolu que le jour où il sera possible d’en extraire les fractions antigéniques vaccinantes. Les vaccins préparés font l’objet d’un contrôle toxicologique et infectieux chez des animaux de laboratoire avant leur essai sur l’homme.L’examen médical préalable des candidats à la vaccination et la recherche des contre-indications constituent le second élément de sécurité. On ne doit pas vacciner les sujets atteints: d’affections malignes, en particulier d’hémopathies; de maladies infectieuses, en cours d’évolution (chez les tuberculeux, on doit attendre un an après la guérison attestée par l’arrêt du traitement); de maladies des reins (les albuminuriques ne sont vaccinés qu’après avoir été soumis à des épreuves fonctionnelles rénales satisfaisantes); de maladies cardiaques décompensées; d’épilepsies à crises répétées. En revanche, on peut vacciner les diabétiques équilibrés, de même que les allergiques (à condition de les soumettre au préalable à des épreuves de tolérance classique). Les femmes enceintes ne doivent pas, en principe, recevoir de vaccins vivants. À partir du quatrième mois de la grossesse, tous les vaccins inactivés sont acceptés, à l’exception des vaccins agressifs comme le T.A.B.Pratique de la vaccinationLes vaccins inactivés sont inoculés par voie parentérale, en injection sous-cutanée. La voie intradermique est valable pour diminuer l’agressivité de certains vaccins (T.A.B., choléra). Deux ou trois injections sont nécessaires suivant les cas, à un intervalle optimal de trente jours qui peut être prolongé jusqu’à deux ou trois mois. Un rappel est indispensable l’année suivante, puis tous les cinq ans au mieux et tous les dix ans au plus.Les vaccins atténués sont administrés soit par injection sous-cutanée (rougeole, rubéole), soit par scarification (variole, B.C.G.), ou injection intradermique (B.C.G.). La voie orale, utilisée pour l’antipoliomyélitique, et la voie nasale, pour certains vaccins antigrippaux, se justifient par le souci de se rapprocher des conditions d’infection naturelle et d’immuniser directement les tissus réceptifs.La pratique des injections sous pression d’air comprimé, par des appareils de type «dermo-jet», est avantageuse dans les vaccinations de masse, aussi bien pour des vaccins atténués qu’inactivés.Les principaux vaccins actuellement utilisés sont étudiés dans les articles CHOLÉRA, COQUELUCHE, DIPHTÉRIE, FIÈVRE JAUNE, FOIE, GRIPPE, OREILLONS, PESTE, POLIOMYÉLITE, RAGE, RICKETTSIES ET RICKETTSIOSES, ROUGEOLE, RUBÉOLE, TÉTANOS, TUBERCULOSE, VARIOLE auxquels on peut se reporter.Le vaccin contre l’hépatite virale B , maladie fréquente dans certains pays du Tiers Monde, chez les malades hémodialysés et parmi le personnel des centres de transfusion sanguine, a été mis au point en France en 1975. La recherche en génétique a permis de mettre au point un vaccin recombinant pour la prévention de l’hépatite B. L’antigène vaccinant HBs est un fragment de l’enveloppe du virus prélevé dans le sang d’un porteur sain.Vaccinations obligatoires :– Tous les enfants doivent être vaccinés contre la diphtérie , le tétanos , la coqueluche et la poliomyélite au cours de la première année, au moyen de 3 injections séparées par des intervalles de 1 à 2 mois (vaccin associé D.T.-Polio); toutefois, le vaccin antipolio peut être pris par voie buccale, mais il est recommandé d’utiliser le vaccin contre la poliomyélite injectable en l’associant aux trois autres; une injection de rappel est obligatoire l’année suivante et – autant que possible – tous les 5 ans jusqu’à l’âge de 20 ans.– Le vaccin antituberculeux (B.C.G.) est obligatoire chez tous les enfants d’âge scolaire ou même avant (crèche). Ce vaccin peut être administré de façon précoce dans un milieu à risque de tuberculose; il est précédé après l’âge de 2 mois d’un test tuberculinique de dépistage et suivi d’un test tuberculinique de contrôle.– Pour les personnels de santé, les vaccinations suivantes sont obligatoires: diphtérie, tétanos, poliomyélite, hépatite B et leurs rappels respectifs. La vaccination antityphoïdique et le B.C.G. sont obligatoires dans certains laboratoires de biologie médicale.Vaccinations recommandées :– Le vaccin associé contre la rougeole , contre la rubéole (virus vivants atténués) et contre les oreillons (R.O.R.) est recommandé pour tous les enfants à partir de 1 an. La vaccination contre la rougeole seule doit être faite à l’âge de 9 mois aux enfants fréquentant les crèches.– Le vaccin antigrippal comporte une seule injection qu’on doit renouveler chaque année en raison de l’incorporation fréquente de nouveaux types de virus. Il est particulièrement recommandé chez les personnes âgées de plus de 65 ans, les insuffisants cardiaques ou respiratoires.– Pour certaines catégories professionnelles, il est recommandé de vacciner contre la leptospirose (égoutiers, employés de voirie, travailleurs agricoles...), la brucellose et la rage (personnels des laboratoires, des abattoirs vétérinaires...).Vaccinations requises à l’étranger : certains pays exigent que les voyageurs en provenance de l’étranger soient vaccinés contre la fièvre jaune ou le choléra, l’hépatite B, la typhoïde, les méningites A et C; il est également recommandé d’être à jour pour les rappels concernant le tétanos, la poliomyélite et le B.C.G. Il faut s’informer, avant le départ, des obligations éventuelles ou des centres de vaccination qualifiés.VaccinothérapieLa vaccinothérapie est une méthode curative qui s’applique à un individu déjà infecté par une bactérie ou un virus contre lequel il se défend imparfaitement, ce dont témoignent la chronicité et les rechutes. Elle se propose d’activer les processus naturels de défense par l’administration prudente et progressive de l’agent pathogène inactivé. La découverte des antibiotiques a réduit son domaine qui se limite actuellement à quelques infections traînantes et récidivantes, résistantes à l’antibiothérapie, telles que les staphylococcies externes, les affections respiratoires chroniques. On utilise soit un autovaccin préparé à partir de l’agent pathogène isolé chez le malade, soit un stock-vaccin contenant des souches soigneusement sélectionnées.2. SérumsLes sérums thérapeutiques fournissent à un sujet menacé ou atteint d’une maladie ou d’une intoxication des anticorps protecteurs spécifiques, immédiatement disponibles, prélevés dans le plasma sanguin d’un organisme immunisé. La sérothérapie préventive ou curative constitue un moyen d’immunisation passive temporaire.L’action des anticorps contenus dans les sérums varie suivant les antigènes en cause. Elle réalise ses meilleurs effets, dans les cas d’infections à germes toxigènes, par neutralisation de la toxine en cause, tout au moins avant sa fixation par les tissus. Dans les infections bactériennes, elle se borne à favoriser la phagocytose des germes libres et parfois à les détruire par bactériolyse, en association avec un complément sanguin. Elle ne s’exerce sur les virus que pendant la période de virémie, avant leur pénétration dans les cellules. Dans tous les cas, l’action préventive l’emporte sur l’action curative. Son caractère passager, lié à l’élimination métabolique ou immunitaire des globulines portant les anticorps, la réduit à un rôle d’expédient provisoire qui contraste avec la protection de longue durée conférée par les vaccins.On utilise, suivant les cas, des sérums d’origine animale ou humaine.Sérums d’origine animaleEmil von Behring et Kitasato Shibasaburo démontrèrent, en 1890, la présence d’une antitoxine dans le sang d’animaux inoculés avec la toxine diphtérique découverte par Émile Roux. Celui-ci obtint, en immunisant des chevaux, des quantités de sérum antitoxique suffisantes pour traiter et guérir des enfants diphtériques (1904). Une vingtaine de sérums ont été, depuis lors, préparés et utilisés avec des fortunes diverses. Les sérums antibactériens ont été détrônés par les antibiotiques, tandis que les sérums antitoxiques sont toujours utilisés.Tous les animaux sont théoriquement des producteurs possibles de sérum. En France, on recourt surtout aux chevaux et rarement aux ovins. L’immunisation est obtenue par inoculation de doses de plus en plus actives d’antigènes contenus dans une culture de bactéries ou de virus, une toxine, un poison animal. L’activité du sérum obtenu est titrée en unités internationales, par référence à un sérum étalon. La plupart des préparations employées sont débarrassées de la majeure partie des protéines inutiles, par une purification physico-chimique qui réalise, en même temps, une concentration des anticorps. La conservation à une température comprise entre + 2 0C et + 15 0C assure aux sérums une validité de trois à cinq ans. Une exposition à la température ordinaire, pendant plus de deux mois, altère leurs propriétés.Les sérums sont administrés en injection sous-cutanée ou intramusculaire. La voie veineuse est utilisée exceptionnellement, après dilution de la dose à injecter dans un soluté physiologique qui est administré en perfusion.Durée de la protection . Les protéines hétérologues provoquent une réaction immunitaire qui débute vers le septième jour et s’accélère ensuite pour éliminer la totalité des antitoxines en deux semaines. Leur destruction s’opère encore plus rapidement chez les sujets sensibilisés par une injection antérieure.Accidents de la sérothérapie . On en distingue trois catégories:– les accidents immédiats, de type anaphylactique (exceptionnels à la suite d’une première injection): ils consistent en dyspnée, troubles cardio-vasculaires aigus, parfois très graves, nécessitant un traitement urgent;– le phénomène d’Arthus , dans les 48 heures suivant l’injection: on observe localement un œdème et une induration rouge, douloureuse, rappelant l’aspect d’un placard d’érysipèle;– au cours de la deuxième semaine suivant l’injection peut se manifester la maladie sérique , caractérisée par la fièvre des arthralgies, des éruptions cutanées. On l’attribue à des dépôts de complexes immuns dans les capillaires et les artères.L’utilisation de sérums purifiés et d’immunoglobulines humaines a réduit considérablement la fréquence de tels accidents.Sérums d’origine humaineLes inconvénients liés à l’inoculation des sérums hétérologues, provenant des animaux, ont conduit à rechercher les moyens d’obtenir une immunisation passive à l’aide de sérums de provenance humaine. On s’est adressé d’abord aux sérums de convalescents, puis aux immunoglobulines (gammaglobulines) extraites du plasma de sujets immunisés. Dans les deux cas, on dispose d’une source d’anticorps homologues possédant, sur la précédente, l’avantage de ne pas entraîner de phénomènes de sensibilisation. La durée de protection est augmentée, l’élimination des globulines humaines ne relevant que de processus métaboliques normaux et non immunitaires. On peut l’estimer à trois semaines au minimum, qu’il s’agisse d’une première injection ou d’une répétition. Il en résulte la suppression des accidents allergiques.Immunoglobulines humainesDans la masse des protéines que contient le plasma sanguin, le rôle de support des anticorps est assumé à peu près exclusivement par des globulines du système gamma, produites par les cellules lymphoïdes et plasmocytaires. On leur a donné le nom d’immunoglobulines (Ig). Elles comprennent plusieurs classes parmi lesquelles les immunoglobulines gamma (IgG) qui représentent la majorité des anticorps antibactériens, antiviraux et antitoxiques. La connaissance précise de ces réactions et l’amélioration des techniques de fractionnement ont permis d’obtenir des préparations d’immunoglobulines vingt fois plus concentrées en anticorps que le plasma d’origine. Les immunoglobulines sont administrées uniquement par voie intramusculaire. Les injections ne provoquent qu’un endolorissement local. Exceptionnellement, des accidents de sensibilisation dus à des phénomènes d’allotypie peuvent s’observer à la suite d’injections répétées. L’immunité conférée dure au moins trois semaines.Les immunoglobulines humaines sont utilisées sous deux formes: les immunoglobulines normales, improprement appelées «gammaglobulines standards», préparées à partir de mélange de plasmas non sélectionnés, et les immunoglobulines spécifiques, extraites du plasma de donneurs immunisés contre une maladie particulière.Immunoglobulines normales (polyvalentes)La richesse en anticorps des immunoglobulines normales dépend de l’état immunologique des donneurs, qui varie suivant l’épidémiologie de la région où sont effectués les prélèvements. D’une façon générale, elles contiennent surtout des anticorps efficaces contre les maladies endémiques (rougeole, hépatite virale). On mélange un nombre considérable de plasmas (au moins un millier) pour obtenir un titre moyen d’un large éventail d’anticorps. Leur activité est exprimée en milligrammes, en raison de la difficulté de titrer chaque catégorie d’anticorps. Ces immunoglobulines contiennent 165 milligrammes de gammaglobulines par millilitre.Les principales indications des IgG normales concernent les affections suivantes:– En premier lieu, les déficiences immunitaires globales qu’on observe dans des affections comme l’agammaglobulinémie et l’hypogammaglobulinémie, maladies congénitales ou acquises dans lesquelles les malades fabriquent peu ou pas d’anticorps. Ces malades sont exposés de ce fait à des infections récidivantes. Le traitement est alors substitutif et prolongé. Des déficiences passagères chez les brûlés, les opérés, les prématurés justifient également l’emploi des IgG normales.– Avant la découverte du vaccin, la prévention de la rougeole était assurée par l’injection d’IgG normales aux personnes en contact avec des malades. On réalisait une séroprévention complète si elle était faite dans les cinq jours qui suivaient la contamination et une séro-atténuation au-delà du sixième jour. La personne fait dans ce cas une rougeole bénigne qui a l’avantage de l’immuniser.Immunoglobulines spécifiquesL’emploi des immunoglobulines spécifiques se justifie dans la prévention de maladies non endémiques ou faiblement immunisantes, vis-à-vis desquelles les Ig normales ont une action faible ou nulle, par insuffisance d’anticorps correspondants (tétanos, coqueluche). Elles sont obtenues par fractionnement du plasma de donneurs sélectionnés, soit immunisés naturellement (convalescents), soit le plus souvent artificiellement par vaccination et rappels périodiques. Le titrage est généralement exprimé en unités biologiques, par référence à un sérum étalon.L’emploi des Ig spécifiques humaines constitue la méthode d’immunisation passive, la plus efficace et la plus sûre. Elle est malheureusement limitée par la difficulté du recrutement des donneurs. On utilise principalement ces immunoglobulines dans la prévention de la coqueluche, du tétanos, de la rubéole, des accidents de la vaccination antivariolique et des incompatibilités sanguines fœto-maternelles dues au facteur Rhésus. Des résultats excellents sont obtenus dans le cas de coqueluche, si l’injection est faite aussitôt ou peu de temps après le contact infectant. En revanche, l’utilisation en est déconseillée dans les coqueluches déclarées où la libération des endotoxines par l’action bactériolytique des Ig spécifiques peut être responsable d’accidents encéphalitiques. Les Ig spécifiques antitétaniques sont particulièrement indiquées chez les blessés non vaccinés ayant déjà reçu du sérum de cheval et chez les allergiques. Elles doivent être associées, comme dans la sérothérapie animale, au vaccin antitétanique dont elles n’entravent pas l’action immunisante.Ig spécifique anti-DSous le nom de sérum anti-D, on utilise des immunoglobulines humaines spécifiques, destinées à prévenir les accidents d’incompatibilité sanguine fœto-maternelle dus au facteur Rhésus. Les donneurs sont recrutés parmi des porteurs d’anticorps anti-Rhésus, à la suite d’une immunisation naturelle ou artificielle. L’administration du sérum anti-D a pour but d’éviter la sensibilisation d’une mère Rh 漣 par les hématies Rh + de son enfant, ce qui entraînerait des accidents au cours d’une grossesse ultérieure. Cette sensibilisation s’effectue aussitôt après l’accouchement, par effraction accidentelle des hématies de l’enfant dans la circulation maternelle. Il convient donc, lorsque l’incompatibilité et l’absence d’anticorps provenant d’un accouchement antérieur ont été établies chez la mère, d’injecter le sérum anti-D dans les soixante-dix-huit heures qui suivent l’accouchement.Les recherches sont très actives en ce qui concerne les piqûres d’arachnide, de scorpion et surtout les morsures de serpent. Les sérums antitoxiques font partie du traitement de l’envenimation qui doit toujours être institué d’urgence.La découverte des anticorps «monoclonaux» (Milstein, 1975) donne d’avantageuses perspectives dans le domaine de l’immunothérapie passive. La fusion d’un plasmocyte humain et d’un lymphocyte immunisé contre un antigène permet d’obtenir un hybride qui sécrète un anticorps spécifique de l’antigène choisi. Cette cellule (hybridome ) se reproduit indéfiniment en culture. On commence à substituer à la sérothérapie l’administration de ces anticorps monoclonaux .
Encyclopédie Universelle. 2012.